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Une patiente se fait peser nue lors de la visite médicale. |
Visite médicale étudiante à l'ancienne.
Le couloir du dispensaire universitaire, un boyau glacial aux néons tremblotants, semblait tout droit sorti d’un film d’horreur de série B. Nous étions en 1980, et la visite médicale annuelle des étudiantes était un rite de passage où l’humiliation rivalisait avec la bureaucratie. Alignées en sous-vêtements, pieds nus sur le carrelage gelé, les filles formaient une mosaïque humaine : des origines diverses, des tempéraments allant de la pudeur monacale à l’exhibitionnisme décomplexé, toutes soumises au regard tyrannique de Madame Dubois, l’infirmière en chef. Avec son chignon d’acier et son sourire de guillotine, elle semblait dire : « Vous êtes à moi, et vous allez le sentir. »
Tout commençait dans le gymnase reconverti en annexe médicale, où l’odeur de désinfectant se mêlait à celle de l’angoisse. « En sous-vêtements, mesdemoiselles ! Et plus vite que ça ! » aboya Madame Dubois, claquant des mains comme un metteur en scène sadique. Les aides-soignantes, surnommées les « Cerbères », patrouillaient, prêtes à bondir sur la moindre récalcitrante. Les vêtements s’entassaient sur des bancs : jeans délavés, jupes à volants, chemisiers à motifs psychédéliques, et surtout, les chaussettes – un festival de socquettes blanches, de modèles à rayures fluo, et même de vieilles chaussettes trouées, témoins des budgets étudiants.
Aïcha, voilée et réservée, incarnait la gêne absolue. Elle ôtait son foulard avec des gestes lents, comme si chaque mouvement était une trahison. Ses chaussettes grises, qu’elle tenta de garder comme un ultime bouclier, furent vite repérées. « Les chaussettes, mademoiselle ! On n’est pas chez les nonnes ! » siffla une Cerbère. Aïcha, rouge de honte, se retrouva en culotte blanche et soutien-gorge démodé, ses pieds nus crispés sur le sol. À l’opposé, Valérie, la rebelle peroxydée, faisait un show. Elle laissa tomber son haut avec une lenteur calculée, révélant une lingerie noire audacieuse, et lança ses chaussettes léopard comme des confettis. « Profitez du spectacle, les filles ! » lança-t-elle, déclenchant des rires.
Marie, la catholique fervente, marmonnait des prières en défaisant sa jupe, ses chaussettes beiges montant jusqu’aux mollets, un choix d’une austérité biblique. « Dépêchez-vous, ce n’est pas l’heure de la messe ! » railla Madame Dubois. Sonia, d’origine antillaise, était déjà en culotte, ses chaussettes arc-en-ciel à moitié baissées, chantonnant du zouk. « C’est pas un défilé de mode ! » grogna une aide-soignante, mais Sonia riposta : « Mes chaussettes, elles ont plus de style que votre blouse ! »
Les internes, jeunes médecins en herbe, observaient depuis un coin, prétendant consulter des dossiers. Pierre, le plus culotté, lançait des piques : « Jolies chaussettes, mademoiselle… un cadeau de grand-mère ? » dit-il à Marie, qui vira écarlate. Valérie contre-attaqua : « Occupe-toi de ta stéthoscope, docteur, mes chaussettes ont plus de fans que toi ! » Aïcha, elle, fixait le sol, priant pour disparaître.
Mais Madame Dubois veillait. Quand elle surprit Leila et Claire en train de glousser tout en bataillant avec leurs chaussettes dépareillées, sa voix claqua : « Vous deux ! Baissez vos culottes, et vite ! » Les filles, pétrifiées, furent traînées au centre, forcées de se dévêtir sous les regards mi-choqués, mi-amusés. Leurs chaussettes – à pois pour Leila, une vieille grise pour Claire – ajoutaient une note comique à leur humiliation. « Retournez dans le rang ! » ordonna Madame Dubois. Leila, mortifiée, se cacha derrière Claire, qui haussa les épaules : « Au moins, nos chaussettes font jaser ! »
Une fois déshabillées, les étudiantes furent alignées dans le couloir, en culotte, soutien-gorge et pieds nus, exposées comme des trophées dans une vitrine perverse. Les chaussettes, abandonnées sur les bancs, semblaient narguer leurs propriétaires, vestiges d’une dignité envolée. Aïcha serrait ses bras contre sa poitrine, son regard fuyant les passants – étudiants égarés ou techniciens de surface – qui jetaient des coups d’œil curieux. Valérie, elle, bombait le torse, sa culotte en dentelle rouge défiant quiconque de la juger. Marie triturait un chapelet imaginaire, tandis que Sonia lançait des blagues osées, indifférente aux regards.
« Silence ! » hurla Madame Dubois, brandissant une règle en bois. Malheur à celles qui osaient parler. Fatima, surprise en train de chuchoter, fut tirée du rang. « Vous trouvez ça drôle ? » siffla l’infirmière, avant de lui administrer une fessée théâtrale, sous les rires nerveux. Puis, dans un élan de cruauté, elle ordonna à Fatima de remettre sa culotte… sur la tête. « Et vos chaussettes sur les mains, pour faire bonne mesure ! » ajouta-t-elle, sadique. Fatima, rouge mais hilare, obéit, ses chaussettes à rayures pendant lamentablement.
La salle d’examen était un autre cercle de l’enfer. Pierre, l’interne à peine diplômé, jouait les apprentis sorciers avec un zèle suspect. « Tout nu, mesdemoiselles, on n’a pas toute la journée ! » lançait-il, un sourire narquois aux lèvres. Poids, taille, tout était noté sous l’œil de Madame Dubois, qui cherchait la moindre faille. « Trois kilos de trop, mademoiselle Leclerc ? Trop de croissants ? » ironisait-elle, provoquant des ricanements.
L’examen devenait plus vicieux. Pierre palpait les seins avec une lenteur exagérée, son « Tout va bien ici » sonnant comme une provocation. La prise de température rectale, annoncée comme une sentence, faisait grimacer les plus aguerries. « Baissez-vous, ce n’est qu’une formalité, » assurait-il, mais son ton trahissait un amusement malsain. Aïcha, qui avait débuté la journée en tremblant, lança un regard de défi à Pierre, comme si sa pudeur s’était muée en audace. Valérie, fidèle à elle-même, plaisanta : « C’est un thermomètre ou un accessoire de cinéma, docteur ? »
Les touchers rectaux et vaginaux, administrés avec une froideur clinique, étaient le clou du spectacle. « Détendez-vous, » murmurait Pierre, mais les filles grimaçaient sous ses sarcasmes.
Ceux et celles qui ont vécu ces visites médicales collectives en gardent un souvenir indélébile, mélange de malaise, d’absurde et d’une étrange nostalgie. Entre l’autorité implacable des soignants, les chaussettes abandonnées comme des reliques, et les rires nerveux, c’était un théâtre où la pudeur était mise à nu. Aïcha, qui était arrivée voilée et tremblante, quitta le dispensaire en riant avec Valérie, son voile légèrement de travers, ses chaussettes soigneusement rangées dans son sac. « Si je dois être à poil, autant que ça vaille le coup, » glissa-t-elle, un sourire espiègle aux lèvres. Valérie tapa dans ses mains : « T’es une championne ! » Même Madame Dubois, en les voyant partir, esquissa un rictus, comme si, l’espace d’un instant, elle reconnaissait leur victoire.
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Examen clinique d'une étudiante nue à la visite médicale. |
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Visite médicale autoritaire et humiliante.